Titre original : Bones and all

2022 - USA - 2h11 - Horreur
Vu au cinéma

Maren, une jeune femme apprenant à survivre en marge de la société, découvre l'amour avec Lee, un intense et marginal vagabond. Ensemble, ils s'embarquent dans une odyssée de 1000km qui les amène à traverser les routes délaissées de l'Amérique profonde. En dépit de leurs efforts pour échapper à leurs passés terrifiants, tout les ramène à leurs démons.


Le réalisateur Luca Guadagnino nous avait déjà gratifiés de l'incroyablement touchant Call me by your name avec Timothée Chalamet, puis avait enchaîné avec le remake du film d'horreur Suspiria. Il nous revient aujourd'hui en mélangeant les deux : son style très tendre du premier film et l'horreur du second (en récupérant au passage Chalamet). Un film d'horreur sur le cannibalisme, un sujet toujours très délicat à traiter mais aussi très à la mode en ce moment (surtout sur Disney+ entre le film Fresh et la série Gannibal), qu'il va essayer de rendre attendrissant.

L'histoire démarre dans les années 80 où une adolescente, Maren (Taylor Russell), s'acclimate à sa nouvelle école et tente de se faire des amis, contre l'avis de son père Frank (André Holland) qui essaye de la garder à la maison le plus possible. Les raisons pour lesquelles il veut la garder loin du monde deviennent bien trop évidentes quand, durant une pyjama party, et alors que Maren devient intime avec l'une de ses camarades, elle se laisse emporter et lui dévore un doigt. Lorsqu'elle rentre couverte de sang, Frank n'a pas l'air surpris et, avec une certaine routine, l'invite à faire ses affaires pour qu'ils partent avant que la police n'arrive, nous laissant comprendre que ce n'est pas la première fois que ça se produit.

Ce sera cependant la dernière fois pour Frank. Quelques mois plus tard, alors qu'ils ont déménagé dans le Maryland, Frank abandonne Maren au beau milieu de la nuit, ne lui laissant qu'un peu d'argent et son certificat de naissance sur lequel se trouve quelques informations sur sa mère, dont elle a tout oublié. Il lui a également laissé une cassette audio pour expliquer son acte. Une cassette qu'elle écoutera par morceaux au cours du film, laissant au spectateur l'occasion d'apprendre comment a démarré cette soif de sang alors qu'elle n'était encore qu'un bébé. Maren se met en route à la recherche de réponses et de sa mère. Aussi incroyable que ça puisse paraître, le film est poétique, romantique et brutal. Un road trip cannibale qui puise ses origines dans la mythologie des vampires et des loups-garous.

Le voyage, et les rencontres qu'elle fera durant chacun de ses arrêts, sont empreints du même sentiment de solitude et de romance que Call me by your name. L'incroyable performance de Russell et Chalamet y est pour beaucoup. Les cannibales du film s'appellent entre eux simplement les Mangeurs et la consommation de chair humaine s'accompagne parfois de honte. Le réalisateur nous le fait comprendre lorsque Maren croise le chemin d'un excentrique Mangeur, nommé Sully (Mark Rylance), qui parle de lui à la troisième personne et est capable de sentir Maren à plus d'un kilomètre. Car oui, les Mangeurs sont capables de se sentir entre eux et de se reconnaître ainsi. Sully apprend à Maren les bases de leur espèce, mais lui apprend aussi l'existence solitaire à laquelle elle est vouée.

La plupart des meurtres du film se déroulent hors champ et c'est à chaque fois comme un rituel. Rien de culturel ou d'occulte, mais plutôt un acte intime entre deux personnes (que ce soit entre deux Mangeurs, ou entre le Mangeur et la personne dévorée). L'aspect cannibalistique prend un peu de recul quand Maren rencontre Lee (Timothée Chalamet), un Mangeur qui a son propre code moral et qui a une véritable connexion avec sa famille (chose rare chez les Mangeurs). Mais le gore reprend le dessus dans une scène clé, durant laquelle Maren et Lee prennent réellement conscience de ce qu'est leur espèce autour d'un feu de camp où un Mangeur, joué par Michael Stuhlbarg, leur fait une révélation.

Le réalisateur dépeint chaque état des États-Unis traversé par le duo avec un incroyable réalisme, utilisant la pellicule pour capturer l'atmosphère, la chaleur et le mystère dans l'air. Les musiques de Trent Reznor et Atticus Ross hantent chaque scène de quelques notes de guitare très simples, mais qui savent garder la tension et l'émotion. Le style lent du réalisateur peut parfois être contraignant, car les explications sur l'origine des Mangeurs sont trop peu nombreuses, mais au final, c'est le road trip qui compte, et il est réussi. On reprochera tout de même au film d'avoir une fin tragique, mais là encore, c'est la marque de fabrique du réalisateur Luca Guadagnino qui n'avait pas forcément fait une fin heureuse dans Call me by your name non plus.

Points positifs

  • Un thème compliqué mais bien travaillé
  • Un casting époustouflant
  • Une ambiance réussie

Points négatifs

  • Légèrement trop long
  • Une fin décevante

Bones and all est un road trip romantique sur le thème du cannibalisme que Luca Guadagnino maîtrise parfaitement et dont les personnages, incroyablement bien joués, se connectent au travers d'un curieux appétit pour la chair humaine. Il est plutôt étonnant de voir une œuvre cannibale dans laquelle on ressent autant de compassion pour le personnage principal (et pas une compassion malsaine à la Hannibal). Il faut peut-être avoir le cœur bien accroché, surtout pour la toute première scène, mais le voyage en vaut la peine.

La note de Critique Universe :

Note : 4.5 sur 5.
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